Adriane Ohanesian, a été exposée à Bayeux cette année pour ses photographies réalisées au Soudan du Sud. Elle nous parle de sa carrière, des difficultés qu’elle a eu lors de ses reportages et de son avantage à être une femme.
Focus sur ces personnes partant sur des terrains souvent hostiles, pour nous informer sur les conflits.
Qui sont-ils ?
Gwendoline Debono, reporter à Europe 1, a remporté le Prix Bayeux-Calvados des correspondants de guerre 2017 dans la catégorie radio pour son reportage « L’entrée dans Mossoul » diffusé le 7 novembre 2016.
Edith Bouvier est journaliste indépendante. Elle parcourt régulièrement le Pakistan, le Congo, l’Ukraine ou encore la Syrie. En février 2012, la ville de Homs est en proie à de violents combats, suite à la répression du pouvoir syrien. Lors des bombardements du centre de presse, Marie Colvin et Rémi Ochlik sont tués. Edith Bouvier est grièvement blessée à la jambe. Avec son confrère William Daniels, elle passe dix jours dans un dispensaire avant d’être exfiltrée du pays.
Quelques mois après son retour en France, elle relate son histoire dans « Chambre avec vue sur la guerre », en rendant un touchant hommage aux Syriens qui l’ont sauvée.
De ce périple en Syrie, Edith Bouvier a publié un livre dans lequel elle ne souhaitait pas raconter son « histoire », mais celle des Syriens.
Suite à sa blessure à la jambe, la journaliste est transferée dans un dispensaire dans le quartier de Baba Amr : « Je crois que j’ai bien vidé tout le stock de morphine ».
En 2012, la population syrienne comptait sur les journalistes pour mettre en lumière leur quotidien. Edith Bouvier explique, toutefois, que leurs articles n’ont pas changé « la face du monde ».
Avec le Festival International du Photojournalisme, le Prix Bayeux-Calvados permet de rassembler les grands reporters. Un moyen de se retrouver, d’échanger et de se « comprendre » entre journalistes.
Je ne vais pas à la stèle chaque année parce que j’en ai marre de perdre mes amis.
La journaliste était présente jeudi 5 octobre au Mémorial des Reporters pour le dévoilement de la stèle 2016 et début 2017. Un moment difficile : « J’en ai marre de perdre chaque année des amis ». Elle a aussi évoqué l’histoire de plusieurs de ses confrères décédés, comme le journaliste mexicain Javier Valdez Cárdenas
En 2012, son exfiltration avec le photographe William Daniels était au centre de l’attention médiatique. Mais Edith Bouvier n’oublie pas toutes les personnes tuées à Homs durant ses dix jours d’épreuves. « Les 20 dernières pages de mon livre sont les plus importantes, j’ai passé beaucoup de temps à réunir une liste non exhaustive. Je dois ce livre aux Syriens ».
Mathieu Marin et Jordan Guérin-Morin
Rencontre avec Valérie Crova, grande reporter radio. Elle nous parle de ses premières expériences, de ses difficultés et de sa carrière aujourd’hui.
Au pied de l’exposition « Conflits oubliés, conflits de demain », à l’Hôtel du Doyen, Clément Saccomani est au téléphone, tel un homme d’affaires. À 36 ans, Clément Saccomani est à la tête de NOOR Images. Il a d’abord arpenté plusieurs pays, comme reporter indépendant. À ce moment, il était journaliste. « C’est vraiment la curiosité qui m’a poussé à ça. J’avais étudié le droit et la science politique avant d’être reporter. »
Il exerce son activité pendant plusieurs années, et traite des sujets qui lui tiennent à coeur. Il se rend notamment en Amérique du Sud pour travailler sur les violences sexuelles, et les brutalités faites aux femmes, en particulier dans les prisons.
Clément Saccomani ne glorifie pas son métier, la dangerosité du terrain ou l’adrénaline qu’il a pu ressentir. Il avoue même qu’une remise en question lui a été nécessaire, après six ans de photoreportage.
Rapidement, le journaliste devient directeur éditorial pour l’agence Magnum photos. Il débute ensuite un projet avec NOOR Images, dont il dirige les activités depuis 2015. « Noor est venu me chercher en m’offrant un poste de directeur général, à Amsterdam. J’ai pu exposer ma vision des choses, ce que je pense de l’industrie de la photographie, son marché, son économie, pour développer et assurer la pérennité de l’agence. »
Dans l’éthique et l’engagement de NOOR, Clément Saccomani retrouve les sujets auxquels il tient, comme la violence faite sur les femmes. Sans s’éloigner du monde de la photographie qu’il affectionne toujours autant, il s’exerce à de nouvelles activités .
Lorsqu’on lui demande s’il regrette le terrain, Clément est partagé. Evidemment, les difficultés du jeune reporter lui viennent à l’esprit.
« Photographe, c’est le plus beau métier du monde »
Avec une métaphore bien à lui, il explique comment il voit la photographie, un travail non plus solitaire mais collectif. « C’est un gros gâteau dont le reporter, lorsqu’il appuie sur l’objectif, serait la cerise. Et beaucoup de maillons participent à l’élaboration de ce gâteau. Les photographies ne sont que la fin d’un long processus. »
Il considère que son rôle de directeur général est plus utile pour l’information. « Mon activité est différente, mais je touche plus de monde, et les travaux de journalistes de Noor disposent d’une large audience. J’ai traité auparavant des sujets que je trouvais très importants, et j’ai réalisé à la fin que c’était compliqué. Je n’avais pas les ressources, les connaissances ou le réseau. Au final je vendais une ou deux photos, et c’était frustrant. »
Clément Saccomani, permet à des journalistes de s’y rendre dans les meilleures conditions possibles. Il travaille avec une nouvelle philosophie : « être heureux pour les autres et pas tristes pour nous. »
Dorian Girard et Alexandre Hodicq
*NOOR Images est une agence photographique créée en 2007.