Une exposition pour fixer la mémoire de Bakhtiyar Haddad

Depuis le 2 octobre et jusqu’au 29, une exposition photographique est consacrée à Bakhtiyar Haddad au musée Mémorial de la Bataille de Normandie, à Bayeux. Ce journaliste et fixeur irakien a perdu la vie le 19 juin dernier, à Mossoul. Portraits de l’homme, reportages auxquels il a contribué, extraits vidéos de sa vie… L’exposition retrace son parcours, étroitement lié au conflit au Kurdistan irakien.

Le casque sur les oreilles, un visiteur s’isole pour regarder la vidéo sur le parcours du fixeur. © Jordan Guérin-Morin

L’exposition « Bakhtiyar Haddad, 15 ans de guerre en Irak » est un enchevêtrement. Des clichés de guerre et des moments de vie, plus calmes, avec le fixeur d’Erbil. Mais la visite n’est pas seulement photographique. Le spectateur y retrouve des vidéos, des textes d’hommage et des reportages publiés dans la presse française sur le conflit irakien.

Sur les murs, la cohabitation semble naturelle. « Bakhtiyar était aussi à l’aise dans le souk que sur la ligne de front », raconte Jean-Pierre Canet, ancien rédacteur en chef d’Envoyé Spécial, dans l’une des vidéos. Ce journaliste et fixeur décédé en juin dernier était un expert. Incontournable pour les journalistes occidentaux qui souhaitaient enquêter sur le front irakien.

Sur la photographie en haut à gauche, Bakhtiyar pose avec sa bien-aimée Mercedes. Sur les trois autres, la guerre. © Aurélien Defer

« Une vie incroyable »

François Hume-Ferkatadji, journaliste free-lance et correspondant pour Radio France en Egypte, est venu « découvrir le personnage » de Bakhtiyar Haddad. Devant ses yeux, certaines photographies du fixeur datent de 2003, sa première expérience en tant que fixeur. D’autres, bien plus récentes, prises en 2017. On le voit sur un toit de maison, en Irak, ou assis sur une chaise aux côtés du journaliste Samuel Forey. 

Au fil de la visite, on retrouve les photographies des journalistes ayant collaboré avec Bakhtiyar Haddad. © Aurélien Defer

Presque 15 ans sur le terrain à accompagner les journalistes internationaux. « Il a eu une vie incroyable, c’est rare d’être fixeur aussi longtemps », commente François Hume-Ferkatadji. « Nous, on ne le connaissait pas, mais tout le monde dit qu’il était le meilleur », poursuit le journaliste.

Une réputation que Bakhtiyar Haddad a forgé au fil de ses nombreuses collaborations avec des journalistes français : Martin Weill, Luc Mathieu, Véronique Robert, Arnaud Comte… Sous les photographies, de courts textes écrits par ceux qui le connaissaient le mieux. « Avec Bakhtiyar Haddad, on se sentait imbattable », décrit Samuel Forey.

À l’entrée de la salle, on découvre le visage de Bakhtiyar Haddad. © Aurélien Defer

Pourtant, à aucun moment, on ne rentre dans l’intimité du fixeur décédé, toujours rattaché au contexte politique irakien. Sans jamais tomber dans le pathétique, les photographies et les reportages de l’exposition défilent. Le visiteur voit les choses évoluer. À la fois Bakhtiyar Haddad, qu’il voit changer physiquement – malgré son sourire qui demeure – et la situation au Nord de l’Irak. 

L’exposition se clôt sur le décès des trois journalistes : Bakhtiyar Haddad, Véronique Robert et Stephan Villeneuve. Un dessin de Plantu, un portrait des deux reporters d’Envoyé Spécial et un sentiment amer. Leurs trois noms ont été gravés, jeudi 5 octobre, sur la stèle du Mémorial des reporters.

Sur la stèle, le nom du fixeur, aux côtés de ceux des deux journalistes d’Envoyé Spécial, décédés avec lui en juin dernier. © Aurélien Defer

Aurélien Defer

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