La Syrie au premier plan

Depuis lundi dans la chapelle du musée de la tapisserie de Bayeux, l’exposition photo « Syrie : une exposition multimédia de l’AFP » propose une immersion dans six ans du conflit, entre combats et trêves.

photo de l'exposition
Une quarantaine de photographies sont affichées dans la chapelle du musée de la tapisserie de Bayeux. © Flavien Larcade

« Des oliviers, des moutons, une  plaine. Mais, en se rapprochant, le paysage cède le pas à la désolation. » Ces propos, extraits d’un « making-of » par la journaliste de l’Agence France Presse (AFP) Rana Massaoui, basée à Beyrouth, suffisent à résumer l’exposition. Celle-ci pourrait se contenter d’évoquer 300 000 morts par l’émotion, mais les photos vont au-delà. Elles semblent vivantes.

Les balles qui sifflent, les murs qui s’effondrent et le fracas des gravas au sol se font entendre. Des bruits qui se dégagent et s’ajoutent aux visages meurtris par les violences. Les corps bougent et les cris de détresse résonnent. Un mouvement rendu possible par l’approche des photographes.

L’immersion par l’image

L’une des photos les plus marquantes est celle de Baraa Al-Halabi. Un homme tient une jeune fille dans ses bras et appelle à l’aide. Prise en 2014 lors d’un bombardement à Alep, ce cliché lui a valu de remporter le Prix Fipcom International de Photojournalisme de l’Émirat de Fujaïrah en 2015. Une scène poignante, où la lumière et la couleur donnent l’impression que la poussière s’échappe dans l’air ambiant. Le cadrage est précis, l’œil se concentre directement sur les personnes au premier plan. 

De la souffrance des civils, le visiteur passe aux photos de combattants sur le terrain. Là aussi, les images s’animent. Les pas cadencés ou les balles qui sifflent se glissent dans les oreilles. Assis, accroupis, mitraillette en main, les images paraissent être prises au même endroit tant les gestes des soldats sont les mêmes. Elles proviennent pourtant de Yahmoul, Alep et Douma  entre 2013 et 2016.

photo enfants murs de l'exposition
Comme sur cette images de Joseph Eid, l’exposition met en avant les enfants syriens. Ici, deux jouent dans les ruines d’Alep en 2017. © Flavien Larcade

Apporter un souffle

Des scènes de combat, le regard se porte ensuite sur les villes démolies. Elles viennent apporter un souffle, la lumière ressemble à celle du calme après la tempête. Une pause avant de se retrouver de nouveau face aux civils. Ceux-ci poursuivent leur existence malgré le chaos.

Hamza Al-Ajweh immortalise ce moment avec un cliché en plan large d’un repas en plein air à Douma en juillet 2016. Il s’agit de l’Iftar, cérémonie de rupture du jeûne du ramadan. Dans les décombres, la scène semble inconcevable. La table, aux couleurs vives, contraste avec le paysage détruit. La nourriture est aussi évoquée dans une vidéo diffusée à proximité. Un soldat confie son « bonheur de manger à nouveau de la viande après quatre ans ». 
L’exposition se termine par le gros plan d’un téléphone portable. Un habitant arpente les ruines de Douma pour jouer à « Pokemon Go », comme il l’aurait fait sans les combats. Le visiteur doit en revanche se réhabituer à la lumière du jour en sortant de la chapelle. Tout en se rappelant que ce qu’il a vu est loin d’être un jeu vidéo mais bien la réalité.

photo petite fille Douma
Une petite fille syrienne attend des soins suite à des bombardements dans la ville de Douma. © Flavien Larcade

Flavien Larcade

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