Les mineurs isolés et oubliés de la jungle de Calais

Quelque 2 000 mineurs migrants isolés ont habité dans la « jungle » de Calais jusqu’à son démantèlement en octobre 2016. Les réalisateurs Thomas Dandois et Stéphane Marchetti ont suivi le quotidien de ces mineurs qui risquent leur vie pour rejoindre l’Angleterre.

Projeté dimanche 8 octobre, au Pavillon Prix Bayeux-Calvados, le film questionne le spectateur sur l’absence de réactions de l’État face à la détresse de ces enfants.

@PrixBayeux

 

Les sirènes de police retentissent. Les enfants affluent. Chaque nuit, sur l’autoroute, le même scénario se dessine. Les enfants posent des troncs d’arbres, entre les camions à l’arrêt, pour obstruer la route et tenter de se cacher pour rejoindre l’Angleterre. « Ils voyaient comme une chance d’arriver dans le nord de la France, ils ont trouvé l’enfer ». La situation est posée, dès le début, par Mathieu Kassovitz, voix-off du film.

Les enfants se confient

Les réalisateurs n’ont pas pensé un énième film sur la situation des migrants mais un suivi nécessaire sur les mineurs isolés de la jungle, abandonnés de tous. Ali, Rafi, Saïd ou encore Salman sont mineurs. Ils ont quitté l’Afghanistan, le Pakistan ou la Syrie, terrains de guerre et de combats incessants. Les témoignages de ces enfants, qui ne dépassent pas les 15 ans, font la force du film.

Sans leurs parents, qui ont souvent déjà fui et auquel un hommage est rendu, ces enfants sont confrontés en permanence à la peur. « Nous passons notre temps à courir. La nuit, les voitures arrivent très vite et la police est sans cesse à nos trousses » explique Saïd qui a fui la Syrie lorsque la guerre a éclaté.

Une loi non-respectée

Les repas froids, les viols, la mort de leurs amis, la violence des policiers. Aucun sujet n’est éludé. Toutefois, un point revient avec insistance : le manquement de l’État français dans l’accompagnement des enfants qui luttent pour leur survie dans le plus grand bidonville d’Europe.

Thomas Dandois et Stéphane Marchetti rappellent, avec conviction, la loi : « Il y a obligation de mettre à l’abri tous les mineurs présents sur le territoire français, instruction pour tous les enfants français et étrangers de 6 à 16 ans ». La Grande-Bretagne et la France ne semblent pas avoir pris conscience des enjeux. Un focus est mis sur les bénévoles qui donnent des cours de français ou aident à faire des activités sportives pour sortir du quotidien.

Le film se termine sur le démantèlement de la jungle en octobre 2016. Le sujet résonne dans l’actualité. Si les enfants ont eu des destins différents : accès à l’Angleterre, placement en foyers en France, d’autres sont revenus à Calais avec des conditions beaucoup plus insoutenables qu’à l’époque. Sur six mois de tournage, le film « Enfants de la jungle » reflète une réalité de la situation qui se transpose partout en France. Le spectateur ressort sonné d’une projection qui amène à réfléchir sur le destin réservé à ces enfants.

Mathieu Marin