Soudan du Sud, les conflits infinis

Conflits Soudan du Sud Photo : Adriane Ohanesian
Les soldats de L’Armée de Libération du Peuple du Soudan (APLS) sur la route de Bentiu à Heglig, à Heglig, Soudan, 17 avril 2012. Pendant dix jours L’Armée de Libération du Peuple du Soudan (APLS) a contrôlé, à la fois, la ville de Heglig et ses champs de pétrole au Soudan. Adriane Ohanesian

Depuis 2011, année de son indépendance, le Soudan du Sud est confronté à une instabilité sans précédent. En 2013, une opposition est née entre deux clans qui luttent pour l’accès au pouvoir. Le conflit, entre Salva Kiir et Riek Machar, deux hommes forts du pays, a débouché sur une guerre civile faisant 300 000 morts et quatre millions de déplacés en quatre ans. Aujourd’hui, ce conflit est considéré, par les spécialistes de la région, comme une guerre oubliée.

Carte Soudan du Sud
Le Soudan du Sud est un pays d’Afrique orientale d’une superficie de 644 329 km². Il est frontalier du Soudan au nord, de l’Ethiopie à l’est, du Kenya, de l’Ouganda et de la République Démocratique du Congo au sud et de la Centrafrique à l’ouest.

Avant  2011, le Soudan du Sud et le Soudan ne formaient qu’un seul et même pays. Partie prenante d’un condominium anglo-égyptien, c’est-à-dire que l’Egypte et l’Angleterre exercent une souveraineté sur le pays, le Soudan obtient son indépendance en 1956. Cette décision est facilitée par la proclamation de la république en Égypte en 1952. Le Soudan est alors divisé en huit provinces elles-mêmes découpées en deux régions : le Nord et le Sud. Dès l’indépendance, des conflits éclatent entre Khartoum, la capitale, et les territoires du sud : le début d’une guerre civile de seize ans. En cause, les fortes inégalités dans l’accès à la santé, à l’éducation, aux transports. Mais également la promesse non tenue par le gouvernement de Khartoum de créer un état fédéral. Le Sud réplique avec des mouvements d’insurrection.

Deuxième Guerre civile pour l’autonomie

En 1972, dans le cadre d’un accord de cessez-le-feu à Addis Abeba (Ethiopie), le Soudan du Sud obtient son autonomie avec à la clé un gouvernement et des compétences élargies. Le répit est de courte durée. En 1983, le président, le général Gaafar Nimeiry, impose la loi islamique à l’ensemble du pays et divise la région du Sud en trois. À la même période, du pétrole est découvert au Sud. Il est exploité par Khartoum. L’Armée de Libération du Peuple du Soudan (APLS) est alors fondée au Sud par un militaire qui deviendra une importante figure politique, John Garang. L’opposition réclame une autonomie accrue et la guerre Nord-Sud reprend. Cette deuxième guerre provoque la mort de deux millions de personnes et le déplacement de quatre millions de civils.

Johon Garang, fondateur de l’Armée de Libération du Peuple du Soudan (APLS)

Naissance du Soudan du Sud

Malgré un cessez-le-feu signé en 2002, cette guerre ne s’arrête officiellement qu’en  janvier 2005, après la signature d’un traité de paix entre Khartoum et l’APLS. Cet accord n’aurait jamais été possible sans l’intervention des États-Unis qui soutenaient les indépendantistes sud soudanais dans leur lutte contre le Soudan d’Omar El Béchir soupçonné de supporter les mouvements islamistes. Le Sud est également epaulé par l’Éthiopie, le Kenya et Israël. Ces trois pays voient en lui un allié contre le Soudan du Nord majoritairement musulman. L’accord prévoit la fin des combats et la tenue d’un référendum à l’issue d’un régime d’autonomie de six ans. John Garang devient vice-président. Le 31 juillet 2005, il meurt dans un accident d’hélicoptère et est remplacé par Salva Kiir. En 2011, un référendum d’autodétermination est organisé. 73% de la population étant analphabète, les citoyens sont appelés à voter avec leur empreintes digitales. Le “oui” l’emporte à 98,85 % . L’indépendance est célébrée le 9 juillet 2011. Naît alors le Soudan du Sud.

Bulletin de vote lors du référendum en 2011
Bulletin de vote lors du référendum 

L’enjeu du pétrole

De nouvelles frontières apparaissent. Elles remettent en cause le principe d’intangibilité des frontières adopté en 1964 par l’Organisation de l’Unité Africaine. Le plus jeune état du monde est un régime fédéral de 619 745 km2 composé de dix états. En 2012, ce pays compte alors douze millions d’habitants. Une population jeune (72% ont moins de trente ans) et pauvre : 51% des habitants vivent avec moins de 50 centimes d’euro par jour. L’accès à l’eau potable est également limité, 5% seulement de la population en bénéficie. 

Le cinquante-quatrième pays africain est un pays enclavé n’ayant pas accès à la mer, ce qui limite son commerce. Le Soudan du Sud possède toutefois deux atouts majeurs : le pétrole et le Nil blanc. Ce dernier permet l’irrigation des cultures dans un pays où l’économie est principalement agricole même si 4,5% seulement des terres sont exploitées. Quant au pétrole, il joue un rôle majeur dans la compréhension du conflit.

 

Pour en savoir plus sur la situation actuelle du Soudan du Sud cliquez ici 

Mariam Koné et Maxime Oliveira

5 moments forts de la journée #3

VENDREDI 6 OCTOBRE. Le Prix Bayeux-Calvados est bel et bien lancé. Plusieurs tables rondes aujourd’hui : Amnesty International et le Soudan du Sud, le devenir de la Turquie… Demain, le prix des correspondants de guerre se dévoilera pleinement avec la liste des lauréats.

1 | Un journaliste au front, le quotidien d’un reporter sur le terrain

Projeté à 14 h 30 au cinéma Le Méliès de Bayeux, Un journaliste au front de Santiago Bertolino suit le travail du reporter de guerre Jesse Rosenfeld sur trois ans. Le documentariste cherche à sensibiliser les spectateurs aux difficultés de ce métier sur le terrain. Pour ce faire, Jesse Rosenfeld est observé dans sa préparation au Canada puis sur le terrain. Au Caire lors de l’élection du général Abdel Fattah Al-Sissi en 2014, en Israël et en Irak.

L’objectif est respecté et le spectateur découvre les problèmes de prendre contact avec des sources, d’être au cœur de l’actualité lorsqu’elle tombe et de pouvoir vendre un sujet préparé à une rédaction. Le pari du réalisateur en est d’autant plus intéressant puisque le journaliste qu’il suit ne travaille que pour la presse écrite. Un support qui, pour le réalisateur, est « plus difficile à vendre ».

Retrouvez une critique du film samedi 7 octobre sur notre site.

2 | La table ronde Amnesty International 

Les clichés d’Adriane Ohanesia ont illustré le propos des intervenantes. © Maxime Oliveira

« C’est un territoire au cœur des ténèbres. » Les mots employés par Michel Beuret, correspondant à Paris pour la Radio Télévision Suisse, au moment de décrire le Sud Soudan, sont particulièrement forts. Ils ont été prononcés lors de la table ronde Amnesty International intitulée « Sud Soudan : le conflit oublié », entre 18 h 30 et 19 h 30 à l’Espace Saint-Patrice de Bayeux.

Adriane Ohanesian, photographe américaine et auteure de l’exposition « Sud Soudan, point d’ébullition », ouverte tous les jours au Musée d’Art et d’Histoire de Bayeux jusqu’au 29 octobre, et Donatella Rovera,  responsable crises et conflits pour Amnesty International, ont apporté leur témoignage avant de répondre aux questions du public.

Les deux femmes ont décrit une région du monde au climat aride, où l’accès à l’eau est compliqué, où environ 95 % de la population est analphabète. Le Sud Soudan, fondé en 2011, est le plus jeune État du monde mais il souffre depuis 2013 d’une guerre civile entre partisans du président Salva Kiir et ceux de l’ancien vice-président Riek Machar. Cette situation entraîne de forts déplacements de populations : environ 2 millions de Sud-Soudanais ont migré depuis 2013, notamment vers l’Ouganda. 

3 | France Culture pose ses valises à l’Hôtel du Doyen

Vendredi 6 octobre, le logo violet de France Culture tapissait les murs de l’Hôtel du Doyen. © Jordan Guérin-Morin

La radio France Culture était en direct de l’Hôtel du Doyen à Bayeux, vendredi 6 octobre. Aurélie Kieffer présentait entre 17 et 18h l’émission « Le magazine de la rédaction », consacrée aux victimes de Daesh. Deux reportages de Marie-Pierre Verot étaient à l’honneur.

Le chercheur du CNRS Pierre-Jean Luizard y a réagi, en apportant ses connaissances sur le sujet. Ensemble, ils ont discuté du sort des femmes yézidies : « Elles sont réduites à l’esclavage sexuel par Daech. L’Etat islamique considère le yézidisme comme la religion du diable », a expliqué le chercheur. 

Nombreux étaient les curieux à se rendre à la diffusion publique. Certains assistaient à une émission radiophonique pour la première fois. Retrouvez plus d’informations dans notre diaporama sonore. 

4 |Bakthyiar Haddad, 15 ans dans la guerre d’Irak

Sur les murs de l’exposition, les photographies témoignent de l’engagement de Baktiyar Haddad. Le fixeur protégeait les journalistes et secourait les blessés. © Jordan Guérin-Morin

Bakhtiyar Haddad était journaliste et fixeur en Irak. Le 19 juin dernier, il  est mort à Mossoul dans l’explosion d’une mine artisanale. Au musée Mémorial de la Bataille de Normandie, une exposition retrace sa vie. Ponctuée de reportages écrits et de vidéos, la visite ne s’intéresse pas uniquement au fixeur. Elle dépeint le lien très fort entre Bakhtiyar Haddad et la situation politique de son pays. Il s’agit de la première exposition consacrée à un fixeur. 

Un premier hommage a déjà été rendu lors du Prix Bayeux-Calvados des correspondants de guerre. Jeudi 5 octobre, le nom de Bakhtiyar Haddad a été gravé sur la stèle à la mémoire des reporters décédés dans l’exercice de leur métier.

Plus d’informations sur l’exposition consacrée à Bakhtiyar Hadad ici

5 | Les lycéens à la rencontre de Hala Kodmani

Hala Kodmani est l’auteure du livre « Seule dans Raqqa », sorti en mars dernier. © Jordan Guérin-Morin

Environ 70 lycéens de Bayeux et du reste du Calvados se sont réunis à 10 h 30 salle Saint-Laurent, pour un échange avec Hala Kodmani, responsable de la rubrique Syrie au journal Libération. Pendant une heure, les élèves ont interrogé la journaliste franco-syrienne sur sa profession, les dangers encourus sur le terrain, l’État Islamique, ou encore sa connaissance du régime de Bachar al-Assad.

Présente hier sur le plateau de France Inter, Hala Kodmani a d’abord décrit le danger de mort qui accompagne les journalistes sur le terrain. Elle est ensuite revenue sur les zones de guerre dévastées, fruit des multiples menaces encerclant les populations (régime syrien, Daesh, voire la coalition internationale). 

Dans le public, des élèves du lycée Jacques-Prévert de Pont-Audemer étaient notamment présents. L’établissement propose un atelier médias à ses lycéens, qui ont pu s’exercer aux productions journalistiques, en prenant des notes ou en procédant à des enregistrements radiophoniques. Ils étaient même plusieurs à exprimer leur déception quand est arrivée la dernière question. C’était également le cas de Fabrice Pilat, professeur d’histoire-géographie à Jacques-Prévert et responsable de l’atelier médias.

La rédaction