5 moments forts de la journée #2

JEUDI 5 OCTOBRE. Aujourd’hui, les classes de collèges et lycées du Calvados se sont déplacées au Festival des correspondants de guerre de Bayeux. Un programme bien fourni s’offrait à eux, comme en témoigne notre récapitulatif de la journée de jeudi 5 octobre. 

1 | Au cœur de Mossoul

Olivier Sarbil nous emmène au cœur de Mossoul, la bataille la plus brutale d’Irak. Jeudi 5 octobre à 21h, son documentaire, sobrement intitulé Mosul, est projeté en avant-première au Pavillon Prix Bayeux-Calvados. Le réalisateur a suivi pendant 6 mois (à partir d’octobre 2016) un groupe de jeunes soldats des forces spéciales irakiennes en lutte contre l’État Islamique. Il y dépeint les émotions et l’engagement des troupes à travers une œuvre aux images très travaillées.

Mosul suit l’expérience de quatre jeunes soldats : Anmar, un diplômé du collège qui cherche à venger son père victime d’une attaque suicide ; Hussein, un tireur d’élite souhaitant devenir footballeur ; Jamal, un sergent plutôt sévère ; et enfin Amjad, une jeune recrue excitée d’être en première ligne.

La projection du documentaire est suivie d’un échange animé par Loïck Berrou, journaliste à France 24, avec Olivier Sarbil, le réalisateur, Gwendoline Debono, journaliste à Europe 1 et Laurent Van der Stock, photojournaliste.

Retrouvez notre critique de Mosul vendredi 6 octobre.

2 | France Inter s’installe à Bayeux 

Fabienne Sintès anime le 18-20 de France Inter depuis le mois de juin. © Alexandre Hodicq

« Bienvenue à Bayeux » : ce sont les mots de Fabienne Sintès, qui a animé la tranche 18-20 de France Inter en public et en direct de la ville normande le jeudi 5 octobre. Une soixante de personnes s’était réunie à l’Hôtel du Doyen. Deux émissions au programme : Un jour dans le monde (18h20-19h20), suivi par Le Téléphone Sonne (19h20-20h). 

Un jour dans le monde s’est intéressé à divers thèmes autour des territoires de conflit. L’animatrice a notamment reçu Anne-Laure Pineau et Lëila Miñano, venues présenter leur livre intitulé Impunité Zéro. Sorti le 4 octobre, il s’agit d’une enquête sur les crimes sexuels en temps de guerre et le manque de sanctions émanant des systèmes judiciaires. « Les soldats qui violent n’ont pas de drapeau », a déclaré Leïla Miñano, mettant notamment en cause les armées françaises et américaines. 

Le Téléphone Sonne posait ensuite une question : « Peut-on voir le monde sans s’engager ? ». Les appels d’auditeurs et quelques timides interventions du public sont venus nourrir le débat.

Retrouvez vendredi 6 octobre un débriefing vidéo des émissions de France Inter sur notre site.

3 | Un hommage aux journalistes morts en terrain de guerre

Vers 18h, les proches des reporters décédés ont enlevé le drap qui cachait la stèle. © Aurélien Defer

« Ce soir, nous aurions pu faire le portrait de 55 journalistes », regrette Christophe Deloire, secrétaire général de l’ONG Reporter Sans Frontière. Il présentait, jeudi 5 octobre, l’inauguration de la stèle 2016-2017 des reporters morts dans l’exercice de leur métier. « Nous rendons hommage à l’ensemble des journalistes qui perdent la vie », poursuit-il. Dans le public, le silence règne. Les rares discussions sont chuchotées.

Pour plus d’informations, retrouvez notre zoom ici.

4 | Les violences de la campagne anti-drogue aux Philippines

Les clichés sont d’une grande violence : les corps des victimes côtoient les visages éplorés de leurs familles. © Roxane de Witte

L’exposition « Guerre contre la drogue aux Philippines : la Ronde de Nuit » se tient jusqu’au 5 novembre à l’Espace d’art actuel Le Radar de Bayeux. Pour capturer ces images, les photo-reporters ont arpenté les rues philippiennes durant la nuit. Au fil de ces « rondes de nuit », ils ont pris conscience de l’étendu des meurtres. Les images de ces crimes dans les rues des quartiers populaires s’accumulent, accompagnées de celles de familles en deuil.

Les photos assemblées par Damir Sagolj (Reuters) choquent et violentent les visiteurs. Mais cette exposition pose une question : vouloir choquer pour dénoncer, est-ce le rôle du journalisme ? 

5 | Un Soudan du Sud à l’abandon

Le Soudan a vu 2 millions de ses habitants fuir vers les pays voisins. © Roxane de Witte

Photographe pour Reuters, Adrianne Ohanesia travaille essentiellement au Soudan du Sud. Son exposition, intitulée « Point d’ébullition – Sud-Soudan et secteurs du Soudan contrôlés par les rebelles » est ouverte jusqu’au 29 octobre au Musée d’Art et d’Histoire Baron Gérard de Bayeux. Ses photos sont le fruit d’un travail réalisé entre juillet 2011 et mars 2017. 55 clichés du quotidien de populations confrontées à un conflit peu connu du grand public.

Les clichés évoquent souvent la mort sans vraiment la représenter, ce qui accentue la force de l’exposition. La représentation des combats est celle de civils luttant pour leur survie et apporte à cette exposition un témoignage poignant.

Retrouvez notre critique de l’exposition ici

Adriane Ohanesia dévoile un Soudan du Sud à l’abandon

Photographe pour Reuters, Adriane Ohanesia travaille essentiellement au Soudan du Sud. Son exposition intitulée « Point d’ébullition – Sud-Soudan et secteurs du Soudan contrôlés par les rebelles » est le résultat d’un travail effectué de juillet 2011 à mars 2017. 55 clichés du quotidien de populations confrontées à un conflit peu connu du grand public.

Adriane Ohanesian a su transmettre de façon remarquable la dureté du conflit et la détresse des populations. © Roxane de Witte

Des combattants à la terrasse d’un café ou fêtant une victoire, les premières photos de l’exposition donnent le ton. Occulter les combats pour montrer le quotidien des populations, non sans violence, est le parti pris d’Adriane Ohanesia. Des évocations d’avant ou après combat, nous laissant imaginer les échanges de tirs ou d’explosifs, dont les conséquences sont, elles, montrées de manière explicite. 

Le plus ancien cliché exposé symbolise le point de départ du conflit. La photo présente des drapeaux sud-soudanais, jonchant le sol, après la première fête d’indépendance, le 9 juillet 2011. La photographe montre un lieu désert où seuls les restes de la fête subsistent. Symbole d’un pays à l’abandon et fui par sa population. 

Une violence présente au quotidien

La photo des drapeaux soudanais dispersés au sol est suivie de cinq photos évoquant les réfugiés. On ressent toute leur détresse, poussés par l’envie de fuir la guerre mais confrontés à une organisation humanitaire débordée. Pourtant, dans ces conditions, ce sont des scènes presque quotidiennes, avec la réalité d‘une organisation du travail. Alors que les femmes pendent le linge sur les barbelés du camp ou vont chercher de l’eau, les enfants et leurs mères attendent les rations alimentaires, que les hommes se chargent de porter. Des populations, également affectées par le climat et le choléra, deux phénomènes mis en valeur par une saisissante flaque d’eau stagnante constellée de mouches, au sein même d’un camp de réfugiés.

Comme une invitation à se poser des questions sur l’aide humanitaire apportée à ces populations. Toutes, surveillés par des Casques bleus, révélant une violence présente sur chaque photo. Vision accentuée par des clichés poignants de villageois fuyants leurs maisons détruites et se terrant dans des grottes pour se protéger des bombardements. 
De photo en photo, Adriane Ohanesia expose le quotidien des populations, sans oublier toute la violence de la guerre. Elle reste suggérée.

L’exposition ira néanmoins plus loin. Physiquement, plusieurs photos frappent le visiteur. Un enfant brulé par une explosion recroquevillé et couvert de plaques, une autre amputée du bras. Des clichés évocateurs de la mort elle-même, sans vraiment la représenter, accentuent la force de l’exposition. Une main gisant dans une mare de sang autour de pansements impuissants. Une autre en état de décomposition abandonnée à même la terre. Des traces de doigt imprimés sur le plastique fondu d’une maison calcinée. Pas un corps ni un visage n’est visible, seule une main, on son empreinte, exposée comme le regret de n’avoir pu la saisir. 

Le choix d’Adriane Ohanesian fait passer les combats au second plan, pour inviter à réfléchir sur les conséquences du conflit, et sur la guerre en elle-même.  Sa représentation des combats est celle de civils luttant pour survivre apporte à cette exposition, techniquement parfaite, un témoignage poignant.

Waldemar de Laage